Holà, plèbe et vous autres notables, prêts à payer pour voir couler le sang! je te reconnais bien là, O peuple à la fibre révolutionnaire
Bon, c'est cool (?) de voir qu'y a toujours du public pour réagir dès qu'on met un peu les pieds dans le plat, salut à tous donc et merci de votre participation et/ou soutien
Je continue donc:
Le producteur executif: entre le directeur de prod et le producteur délégué (le big boss), se trouve ce poste dont plusieurs individus qu'il m'a été donné de croiser ont bien niqué l'image, et créé ce que j'appelle la "production executive à la française".
Je vous ai expliqué que le directeur de prod pouvait parfois être une baltringue et ne pas connaître ou comprendre tous les rouages ou paramètres inhérents à son secteur d'activité, pour peu qu'il ait des subalternes (chargés de prod) relativement compétents, il s'en tirerait quand même relativement bien.
Mais encore plus fort, le poste de producteur executif, tel qu'il se pratique chez nous, permet encore plus d'excès et de déviances en tous genres:
-Alors que pour la plupart des métiers dans le monde, une formation spécifique et un minimum d'expérience s'imposent pour être apte à exercer correctement, le poste de producteur executif ne s'encombre pas de tels considérations, et l'on voit débarquer toujours plus nombreux et le sourire aux lèvres les nouveaux aspirants à ce titre ô combien convoité.
"Producteur exécutif" ça claque, on comprend pas exactement ce que ça veut dire, mais ça fait sérieux et maillé, et pour se la béflan en résoi, quand y'a marqué ça sur une petite carte que tu vas distribuer à des gens qui pourront te servir un jour, ça gère.
Et c'est la fête, vu que tu peux arriver de n'importe où, absolument rien connaître (ou pas grand-chose) de l'audiovisuel, si tu maîtrises le relationnel et que tu as réussi à embobiner les bonnes personnes, pour toi c'est gagné!
Mais et alors quoi? Qu'est-ce qu'il est censé faire le producteur executif, et s'il est bon à rien pourquoi est-ce qu'il est engagé?
Son rôle est un peu ambigu, et diffère pas mal selon les sociétés et les individus, et en fonction de la hiérarchie interne préexistante à son arrivée. Disons pour faire un peu simple, même si un grand nombre de cas de figures et de variantes sont possibles, que idéalement le producteur executif devrait gérer un projet de bout en bout. C'est à dire à partir du moment où le producteur délégué est en négociation pour acquérir les droits d'un projet, jusqu'aux dernières livraisons de PAD (les K7, on suit au fond!), en passant par le choix de l'équipe d'encadrement (Réal, Directeur d'écriture, Dir prod, Chargé de prod et prestataires principaux).
Aux états-unis, il n'existe non pas 1 producteur executif par prod, mais 2 ou 3 voire plus dans le cas de très gros shows qui ont un enjeu important (obligation de réussite passant par une qualité maximale, surtout contrôlée au niveau de l'écriture et de la mise en scène, et des moyens mis en oeuvre pour la fabrication). Les gens qui occupent ces postes sont généralement des professionels très expérimentés et impliqués (comme les auteurs du concept original du projet, ou parfois des consultants prestigieux dans différents domaines -qui reçoivent cette dénomination à titre honorifique -parfois appelé "creative producer".)
Mais en France, comme on n'a malheureusement pas les mêmes moyens et surtout parce que les producteurs (délégués) français se disent qu'ils sont plus malins et qu'ils vont faire des économies, ils engagent un producteur executif qui va bosser régulièrement sur plusieurs (voire toutes les) séries que produit sa boîte.
Et forcément comme on n'est pas toujours plus malins que les étasuniens, qui ont quand même rôdé et peaufiné leur système depuis des dizaines et des dizaines d'années, ben on se retrouve avec un poste, qui en fonction du tempérament et des capacités de celui qui l'occupe, va de super dir prod (rarissime) à cancrelat grippant le système, en passant par bienheureux innofensif et inutile (qui ne fera qu'alourdir le déficit de sa compagnie).
Pourquoi sont ils engagés même s'ils sont mauvais ou inutiles? Parcequ'ils n'ont qu'une seule personne à convaincre: le producteur délégué. Si celui-ci trouve que l'aspirant est viable voire performant (celui-ci pourrait sûrement l'aider à convaincre des diffuseurs, voire faire des ventes internationales, nouer des liens avec différents partenaires grâce à sa tchatche et son présumé super carnet d'adresses, et en tous cas prendre en charge le merdier à sa place) c'est la fête pour au moins 1 bonne année... jusqu'au moment du bilan des comptes. Mais bien sûr, si les performances escomptées ne sont pas au rendez-vous, il sera toujours temps de blâmer la conjoncture économique du moment, les changements éditoriaux de tel ou tel gros diffuseur ou sa frilosité à s'engager, toutes les excuses possibles et immaginables de (géo)politique seront utilisées pour relativiser l'echec, tant que la boite tient debout.
Mais alors comment le système tient, si il est aussi pourri que ce que je décris?
Ce sera l'objet de mon prochain post.
A+

Bac +2, les enfants... c'est ça la puissance intellectuelle !