Tsuka : Je suis avec le fondateur de « Sav the world
», Bonjour Savin, je vais te demander de te présenter.
SYE : Bonjour, je m'appelle Savin Yeatman-Eiffel,
je suis le fondateur de « Sav the world », également
producteur de la série Molly que j’ai créé
il y a 4-5 ans et qui a subit pas mal d’évolutions
avant d’en arriver là ou on en est actuellement ...
et je suis aussi co-réalisateur du pilote avec Thomas.
En quelques mots j’ai monté « Sav the world »
il y a 4-5 ans maintenant après avoir bossé pour d’autres
sociétés d’animation française, des expériences
intéressantes mais un peu frustrantes, avec des projets qui
correspondaient pas vraiment à ce que j’attendais ...
avec d’un coté des souvenirs d’animation jap
que j’avais vu quand j’étais petit et qui m’avaient
profondément marquées, et les série que je
pouvais choper en revenant du Japon ... et ce qu’on faisait
ici qui était beaucoup plus classique, manquant un peu de
délire, de fun, je voulais faire des projets un petit peu
plus personnels, un peu plus fouillés que ça.
On a commencé avec un projet qui s’appelait «
Urban racer » à l’époque, un concept simple
de course mais avec un développement comme dans une série
japonaise, avec une série qui se développe d’épisodes
en épisodes, avec des personnages un petit peu délirants,
un petit peu complexes. On a fait beaucoup de recherches à
l’époque, c’était au tout début
et c’est là que j’ai rencontré Thomas
et un petit gars qui allait devenir important et qui s’appelle
Loïc (aka Loixm) et tous les 2 ont fait beaucoup de recherches
... mais ils étaient au tout début de leur parcours
dans le dessin et Thomas était encore dans une école
d’ingénieur ou un truc dans le genre, il ne pensait
pas du tout à l’animation encore à ce moment
là.
Petit à petit le projet a mûri, on a fait beaucoup
de travail à ce moment là. Le problème c’est
que l’animation japonaise avait une super mauvaise presse
en France il y a 4-5 ans. On a l’air d’oublier mais
il y a eu une super période dans les années 80 et
début 90 avec les séries japonaises, mais après
y en a peut être eu un petit peu trop de critiques de producteurs
français qui voulaient voir de l’animation française,
couplées à des réclamations de parents suite
à la diffusion de « Ken le survivant », de ce
genre de séries qui sont de très bonnes séries
mais qui sont peut être passé sur un créneau
horaire un peu trop « enfant » ... les gens des chaînes
ne voulaient plus entendre parler du moindre rapport avec le Japon.
On a revu un peu le projet en le « dé-japonisant »,
c'est-à-dire qu’on avait certaines influences qui étaient
à l’époque assez japonaises, au niveau du design
on a opté pour quelque chose de pus européen, américain
... on a fait un petit pilote et ça a été un
peu la galère, c’était le premier pilote qu’on
faisait, à l’époque je connaissait pas encore
d’animateurs sur Paris et je voulais me préparer à
une production de série alors on a fait le pilote en Corée,
ça a été compliqué pour faire l’animation,
ça a été un petit peu la galère ...
on a essuyé beaucoup de plâtres.
On étaient pas super content du pilote qu’on avait
au début et puis les chaînes quand elles voyaient une
petite boite qui débarquait ils en avaient rien à
faire que ce soit un design japonais ou américain (rires).
Donc on s’est dit « ok on retient la leçon, on
met dans le sac » et on va attendre que le truc mûrisse
un peu plus. On a fait des petits trucs humoristiques pour Canal+
, des parodies d’anims qui sont passés sur les guignols,
des parodies de « Barbapapa » et de « Southpark
», on a fait un court métrage qui s’appelait
« Squat » qui tournait dans les festivals et qui était
une manière d’apprendre un peu mieux les techniques
d’animation.
Thomas a fait les Gobelins pendant 2 ans et petit à petit
on commençait à avancer, c’était dur
mais on a aussi fait un projet important pour enfant qui s’appelait
« Thomas & Co », au moment ou justement Thomas était
aux Gobelins. On en a fait un truc assez sympa vu qu'on connaissait
alors des animateurs, on s’est lié a tout le milieu
animateur sur Paris et on a fait avec une bande d’animateurs
et très peu de moyens un petit trailer de 4minutes qui nous
a au moins ouvert les portes des diffuseurs français. On
a été reçu, on a enfin remarqué qu’on
existait alors que ça faisait déjà 3 ans qu’on
existait à peu près et on a signé avec TF1
un deal sur ce projet là mais on a pas encore trouvé
le financement qui nous manque ... parce que c’est pas juste
une chaîne française qui va financer une série,
il faut vraiment vendre à l'international, donc c’est
en phase d’être fait mais malheureusement avec le 11
septembre le monde de l’animation s’est un petit peu
rétrécit mais on espère que « Thomas
& o » démarrera à la fin de l’année.
On s’est relancé sur « Urban » qui est
devenu Molly, donc le concept est toujours le même, mais il
s’est affiné avec le temps ... et le truc important
c’est que le héros est devenu une héroïne
afin de rajouter une touche émotionnelle au personnage, pour
qu’en plus du délire on ait un panel d’émotion
comme dans les séries japonaise, avec de l’émotion,
de l’action, de l’humour, mélanger un peu tous
ces trucs là.
On a repris un peu le design, on a laissé libre court à
ce qu’on voulait faire au départ, un coté assez
japonais et en le mélangeant au truc européen, pas
faire une série de « manga » mais faire une série
a forte influence japonaise revue et corrigée.
On a fait un petit trailer de seulement 2min30 mais avec en moyenne
un plan toutes les 16 images donc c’est speed, on l’a
fait l’été dernier en 2 mois, c’était
très rapide quand même pour un truc assez complexe
qui mélange la 2D et la 3D, il a été bien reçu,
les diffuseurs aiment, on a signé avec France3 un deal de
développement, on négocie avec plusieurs grosses chaînes
européennes, la concurrence est forte mais on espère
tirer notre épingle du jeu ... croisons les droits pour que
Molly parte en prod.
Ce qui est intéressant c’est qu’on est aussi
en contact avec des boites japonaises qui ont beaucoup aimés
le travail qu’on avait fait sur le trailer, on voudrait bosser
avec une boite française de 3D et un studio japonais pour
la 2D et mélanger un petit peu les 2 techniques comme on
a fait sur le trailer.
Bosser avec le Japon c’est vraiment un truc qui nous branche
vraiment donc on est à fond dans cette option là.
Ce qui est sympa aussi c’est tout le bouche à oreille
qu’il y a autour du pilote qui est passé dans quelques
festivals et qui a gagné quelques prix. Il y a eu un reportage
sur nous au Japon qui nous a permis de nous mettre en contact avec
certaine boites japonaises, et sur le net ça télécharge
bien, on est sur pas mal de site en téléchargement,
sur certains sites notamment on a des bons « ratings »
et de très bon « fan-sites » qui ont étés
fait dont un très bon en France et 2 américains ...
donc c’est le début de quelque chose qui est assez
vivant et qui fait vivre un peu le projet.
On est aussi en contact avec des boites de jeux vidéos, on
essaie de voir si il y a moyen de monter un deal la dessus avec
eux. Ce qui est marrant c’est qu'il y a des gens qui ont vus
le trailer sur le net, et qui nous contactent ... Il y a des rencontres
qui se font comme ça donc on espère que tout va se
concrétiser.
Tsuka : Votre premier projet a été refusé
il y a 4 ans, vous l'avez retravaillé pour devenir ce qu’il
est aujourd’hui mais est ce que vous pensez que la vague «
Pokémon » a permis d’ouvrir plus facilement les
portes des diffuseurs pour ce nouveau trailer par rapport à
l’époque ?
SYE : Il y a un facteur déterminant qui
nous a fait poursuivre dans notre influence japonaise, de ne pas
la renier mais de l’exploiter, c’est « Pokemon
».
C’est une série qui a extrêmement bien marché
et si on réfléchit bien y a pas énormément
de séries japonaises qui marchent bien a l’étranger
... c’est aussi une des raisons qui me fait penser que les
boites japonaises ont envie de bosser avec nous et entre «
Pokemon », Digimon » et « Card captor Sakura »,
ça a envoyé un grand coup de nouveauté, et
je pense que hormis le marché du DVD qui présente
pas mal de séries particulières, les séries
télé sont considérés comme étant
pour les gamins, il y a des problèmes de standards pour un
diffuseur européen et que ce soit un bonne chose ou une mauvaise,
c’est comme ça.
En tout cas toute cette vague là a changé le point
de vue des chaînes européennes, et maintenant il n’y
a plus aucun stress sur l’animation ... je dirais même
au contraire, chez certains diffuseurs. Pour Molly, le mélange
des genres est un truc qui plaît beaucoup. D’un coté
producteur des chaînes qui ont pas trop envie de passer de
l’animation japonaise ou qui ont des raison stupides d’image,
d’actionnaires, de machins, Molly est pour eux le compromis
idéal, qui a la pêche d’une série japonaise
sans en être une ... je veux pas rentrer dans le débat
du « c’est bien ou pas bien » mais en tout cas
pour nous c’est un avantage.
C’est clair que les mentalités ont changées
mais pas partout non plus, y a des chaînes qui refusent de
passer de l’animation japonaise, y a des gens très
hermétiques, y a des gens qui sont un peu énervés
de cette vague là et qui voudraient ramener vers quelque
chose de plus traditionnel ... enfin on va voir, affaire à
suivre, en tout cas nous on est à fond dans cette mouvance
là et on va essayer de casser la baraque sur tout.
Je vous remercie beaucoup.