De retour pour un nouveau bilan. Nous sommes toujours très occupés, mais c'est passionnant d'être en pleine prod et de voir les épisodes se constuire petit a petit.

Le premier épisode est très particulier : il s'agit d'une introduction a l'univers de Molly et ne révèle rien des surprises qui vont arriver à partir de l'épisode 2. Il se passe dans un cadre très différent de ce que les spectateurs pourront découvrir par la suite. Mais comme souvent pour un premier épisode, le temps passe a l’exposition ne permet pas encore de rentrer vraiment dans l’intimité des personnages. On aurait idéalement préféré s’étaler sur 2 ou 3 épisodes, mais nous avons déjà eu du mal a faire accepter aux partenaires (financiers) que ce premier épisode ne soit pas représentatif de la série, donc on a préféré accélerer le rythme pour plus vite arriver aux choses serieuses.
L'épisode 1 a été supervisé par une très bonne équipe et la qualité générale est bonne. Mon seul regret porte sur les décors : il y a beaucoup de lieux qui n'apparaitront plus jamais dans la série et donc nous n’avons pas eu le temps d’approfondir et de passer beaucoup de temps dessus.

A l’épisode 2 on met en place l’univers « SF » de Molly que nous avons développé pendant de longs mois. Il est très riche visuellement et on continue a exposer les lieux et les enjeux de la série. Je m'inquiete pourtant un peu du rythme de ces 2 premiers épisodes. La mise en place de la série est assez lourde et ces premiers épisodes sont un peu trop chargés en évènements a mon gout. Mais j’attend avec impatience la musique, les voix et les bruitages pour me donner une idée correcte du rythme de ce début de série. Cet épisode 2 a été aussi très bien supervisé et il y a des passages très reussis du point de vue de leur animation. Ca été notamment un grand moment de découvrir les plans animés de la première course de Star-racer.

La série atteint son rythme de croisière a partir de l'épisode 3. Malheureusement il a été réalisé dans des temps très serrés et on a eu des problèmes au niveau du staff dessus, notamment un directeur d’anim trouvé a la dernière minute. Bien que d’un très bon niveau il n’a eu que très peu de temps pour corriger les dessins des animateurs. Et certains animateurs débutants ayant encore un niveau de dessin assez faible, on a généralement une qualité d’anim moins bonne que sur les deux premiers épisodes. Par contre la dynamique scénario/mise en scène marche très bien et l’épisode sera sans doute très reussi du point de vue de son contenu. La production des images 3D de cet épisode est en cours actuellement et la séquence de course risque d'être assez épique!

L’épisode 4 a été fabriqué en externe par autre studio particulièrement efficace. La qualité n’est pas la meilleure, l’anim étant generalement assez basique, mais les dessins sont pas mal et le contenu de l’épisode sera très amusant.

On me parle encore souvent du trailer, et j'ai envie de préciser que le ton de Molly a changé depuis ce pilote réalisé il y a maintenant déjà 3 ans.
L'écriture des épisodes est riche, les intrigues relativement complexes et les personnages bien creusés par rapport a une série classique européenne. C'est les avantages de la série feuilletonnante. La série a je pense un bel arc narratif et les personnages vont évoluer du début a la fin. Le graphisme et la mise en scène se sont tout naturellement adaptés et nous avons déliberement abandonné tous les codes de stylisation propre a la BD japonaise pour une représentaion plus réaliste des expressions des personnages. Notre principal soucis étant de rendre crédible l'univers de Molly et nous avons pour ça choisi de ne pas utiliser la caricature. Il y a des choses qui marchent bien sur un clip mais qui ne fonctionnent plus lorsqu'on passe a des durées plus longues. Plus de dents en triangles par ex ;)

De même, quand a vos attentes au sujet de la qualité d'animation, il faut rappeler que Molly est une série qui - même si elle est fabriquée dans des conditions particulières - a un budgêt du même ordre que celui de la plupart des séries produites en France, ce qui ne nous permet pas d'atteindre le niveau de finition et d'animation de séries japonaises de grande qualité.
L'interêt de Molly se situera non pas sur la performance visuelle, mais plus a long terme, sur l'immersion dans son univers et la familiarisation avec ses personnages. Bien sur, tout le monde fait de son mieux pour obtenir le niveau technique le plus élevé, mais ça reste difficile de trouver des très bons animateurs et de maintenir le niveau.

La 3D bosse actuellement sur les épisodes 2 a 12 simultanément a différents stades (layout, anim, compositing). Le compositing a commencé il y a pas longtemps, mais ce qu'on a recu pour le moment est d'un niveau vraiment très élevé. On est vraiment super contents du boulot de l'équipe française, ca va changer par rapport aux series habituelles, surtout japonaises, ou la 3D n'apporte pas souvent grand chose. Dans Molly elle est vraiment un élement clef et je crois que les spectateurs seront bien scotchés a leurs fauteuils pendant les scènes de course. Techniquement, c'est bien plus abouti que le pilote et les décors sont notamment superbes. Je suis moins content des décors 2D, mais c'est ca qui est dur avec la prod du côté japonais, c'est que tout est un peu dispersé et c'est dur d'avoir une qualité constante.

En ce qui concerne la 2D on a fini 8 premiers épisodes jusqu'au compositing et les épisodes 9,10,11 et 12 sont en prod.
C'est globalement plus difficile que la 3D. Le systeme japonais se caracterise notamment par le rôle clef du directeur d'animation. Il y en a 1 par épisode, environ 4 ou 5 sur une série, et chacun s'occupe de garantir la qualité graphique et de mouvement de son propre épisode. Bien sur a individus différents, compétences et manières de dessiner différentes. Certains font un travail très consciencieux, d'autres, pas assez de corrections a mon goût. On a donc eu de problemes sur certains épisodes. Il a notamment été décidé que nous allions vérifier le travail a la phase des layouts et des poses clefs. Sur les premiers épisodes, de 1 a 5, après le storyboard, nous n'avons vérifié le travail qu'après le compositing et nous avons été obligés de demander pas mal de retakes. Et comme prévenir vaut mieux que guérir, maintenant on a la possibilité d'intervenir plus tôt.

Un exemple :


C'est une image du premier épisode dont l'anim a été dirigée par monsieur Tetsuya Kumagai. Des différents directeurs d'animation de la série, c'est celui qui a le style le plus graphique.

Dans l'épisode 2 on aura une Molly au design un peu plus doux, dans le 3 une molly aux expressions plus marquées, avec un style un peu plus humoristique (mais sans aller dans la caricature), le 4 des dessins assez solides mais encore différents par rapport aux autres épisodes. Chaque directeur d'animation a sa propre interprétation du modèle et les spectateurs pourront remarquer des légères différences d'un épisode a l'autre. Il s'agit d'une des particularités du système japonais dans le quel le directeur d'anim a un rôle crucial. Sur certaines séries très haut de gamme, il y a un directeur d'anim global sur la série pour maintenir la cohérence, mais sur Molly nous n'avions pas prévu ce poste. Pourtant. a partir de l'épisode 6, je reprend moi-même les dessins qui mes déplaisent ou me paraissent trop éloignés du modèle, principalement les visages, mais on continuera a voir des différences de design entre les épisodes.

En plus de la 3D a superviser et les designs de chaque épisodes a créer, on a donc, avec Stan, chaque jour, une petite pile de dessins a checher et a corriger éventuellement. Stan s'occupant des mechas lorsqu'ils sont dessinés en 2D, et moi des personnages. Mais le temps qu'on peut y passer est très limité, et c'est plus un coup de pouce pour "sauver les meubles" plus que des corrections très poussées. Il y aura donc sans doute des épisodes moins bien dessinés, et je sais déjà lesquels ! Mais épisode moins bien dessiné ne signifie pas moins bon épisode, car par exemple, l'équipe parisienne de Pumpkin (qui fait la 3D) a beaucoup plus aimé le 3 que le 1 qui est pourtant mieux dessiné. C'est donc avant tout le contenu qui prédomine.

L'aspect musical est aussi très excitant. Le producteur nous a proposé des noms assez presigieux, par exemple Iwasaki Toru (Tetsujin 28, Whitch Hunter Robin, Ima soko ni iru boku...) ou Senju Akira (Princess Arete), mais il faut qu'on choisisse le plus adapté a la série et qu'il soit disponible. Il va encore nous présenter le travail d'autres pour qu'on ait le choix le plus vaste.

A signaler aussi le départ de Christophe Yoshida qui a dessiné quelques story-boards, et l'arrivée de Guillaume Quatravaux, sorti de l'EMCA, qui, bien que forme a l'animation, n'utilisera pas ses talents de dessinateur, mais nous soutiendra en organisant le suivi de production 3D (depouillements des boards, envoi des commentaires, gestion de l'avancement des plans) qui est un travail nécessitant une personne a temps complet.

En tout cas c'est interessant de voir se créer tout le travail autour de soi, de suivre chaque étape de fabrication, layout, anim. paint, décors, compositing etc... C'est vraiment concret. On comprend bien les difficultés et les différences de niveau entre les animateurs. Une experience qui nous sera utile lorsqu'on concevra les prochains projets.

A bientôt pour de nouvelles infos !

Thomas Romain,
au nom de l'équipe Sav! The World